L’inclusivité : La condition sine qua non

L'art évolue vers plus d'inclusivité, enrichissant la diversité mais soulevant des dérives. Quel est l'impact réel sur la création?

Depuis quelques années, on voit se réaliser le projet d’une plus grande inclusivité dans le milieu de l’art. Que ce soit dans le monde du cinéma, de la mode ou de la littérature, les productions tendent à plus de diversité. Ainsi avons-nous vu évoluer le paysage artistique au cours de ce XXIème siècle. Mais, si l’inclusivité semble être un progrès pour différentes raisons, il s’agit également de relever les dérives qui en découlent…

Avez-vous dit « inclusivité » ?

L’inclusivité désigne le fait d’inclure tout le monde et, par extension, de n’exclure personne. Dans le cadre de créations, l’inclusivité se traduit par l’ambition de donner sa place à chacun, et ce, à chaque endroit de la production. Autrement dit, que ce soit au sein d’une œuvre, en tant qu’auteur, ou ailleurs dans le processus de création, tout le monde doit avoir la possibilité d’être représenté. Toutefois, il s’agit surtout de mettre en avant des personnes ou des thèmes minoritaires ou jusqu’ici sous-représentés. À ce titre, l’inclusivité prend en compte des paramètres tels que la diversité de genre, raciale, culturelle, d’orientation sexuelle, la différence physique, le handicap, etc.

L’inclusivité, ou une histoire de représentation ?

À première vue, l’idée de l’inclusivité semble réjouissante. En effet, dans une époque où l’on sait l’importance des représentations, on ne peut qu’être favorable à l’idée d’offrir à chacun la possibilité d’être vu et de se reconnaître dans nos productions. De plus, l’inclusivité agrandit le champ des possibles car en proposant de nouvelles thématiques et de nouveaux acteurs, elle permet l’invention de nouvelles histoires. Le gage de l’inclusivité peut également laisser place à des réécritures. Ces dernières sont particulièrement riches en termes de signification puisqu’elles permettent, d’une part, un nouveau point de vue sur une œuvre connue, et d’autre part, parce qu’elles ouvrent la possibilité d’un dialogue entre les textes. La rencontre est peut-être l’élément le plus important qu’offre l’inclusivité ; la rencontre avec l’autre, mais surtout la possibilité de se rencontrer soi-même.

Mais, comme tout bon projet, celui de l’inclusivité comporte aussi des dérives. En effet, nous sommes aujourd’hui confrontés à la tendance qui consiste à relever le manque d’inclusivité au sein des productions littéraires, qu’elles soient récentes ou non. Bien qu’il soit important de toujours prendre du recul vis-à-vis d’un texte, cette habitude tend à se transformer en une véritable traque à « l’exclusif ». Dès lors qu’une publication n’est pas jugée assez inclusive, elle est irrecevable. Force est de constater que l’inclusivité est devenue la condition sine qua non d’une « bonne » œuvre.

Cette règle, par son caractère inflexible et démesuré, dépasse les limites du bon sens, et ce, dans plusieurs cas :

  • D’abord, il ne fait aucun sens de juger une œuvre qui appartient à un autre temps selon des critères qui nous sont contemporains. Bien qu’il soit nécessaire de garder un œil critique sur ce qui nous est présenté, il est primordial de prendre en compte le contexte d’énonciation afin de ne pas commettre d’anachronismes. Le but n’étant pas d’accepter tout ce qui a pu être dit par le passé, mais plutôt de le comprendre et d’en tirer un apprentissage.
  • Ensuite, il s’agit de tenir compte de certains écrits qui relatent un temps ou un espace qui sont moins susceptibles de présenter une certaine diversité. Dans ces cas-là, l’inclusivité peut s’imposer comme un contresens. Alors que faire ? S’il est tout à fait possible de vouloir mettre en avant des personnes ou des thèmes en dépit du sens, il semble également raisonnable de laisser la possibilité, à un auteur, de rester plus proche d’une certaine réalité.
  • Maintenant, qu’en est-il des œuvres modernes, qui relatent un temps et un espace propice à la diversité ? « Elles n’ont aucune excuse ! », me diriez-vous. Et pourtant, j’ai envie de croire qu’une œuvre peut être bienveillante sans pour autant cocher les cases de l’inclusivité.

À bien y réfléchir, cela semble presque incorrect de parler d’inclusivité, lorsqu’on sait qu’une œuvre ne pourra jamais l’être complètement. Dès lors qu’on parle d’un sujet, on en exclue forcément un autre ; par conséquent, une œuvre sera toujours, à un endroit ou à un autre, « exclusive ». Et puisque l’inclusivité, telle qu’érigée par notre génération, ne semble promouvoir qu’un certain type de sujet, ne tend-t-elle pas à être l’exclusive ?

L’écriture inclusive inclut-elle réellement ?

Finalement, est-ce réellement bénéfique d’imposer une certaine forme d’inclusivité à nos récits ? Ne devrait-elle pas rester naturelle ? C’est en tout cas l’esprit de la maison d’édition Une Autre Voix, pour qui l’inclusivité ne relève pas d’un asservissement aveugle, mais plutôt d’une évidence naturelle.
Par ailleurs, si cet écrit s’est principalement concentré sur l’inclusivité en termes de contenu, nous n’avons pas abordé la question de la forme. Cette dernière est pourtant au cœur de nombreuses polémiques : en effet, la question de l’écriture inclusive suscite débat. Peut-être, cela constituera-t-il le sujet d’un prochain article publié par Une Autre Voix… ?

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