Un beau gosse hâbleur, un fils de, un bobo, une tête à claques… tous ses détracteurs se réjouiront de la condamnation en première instance du réalisateur, acteur et humoriste Nicolas Bedos, condamné à un an de prison, dont six mois avec sursis, pour des agressions sexuelles. Mais qu’est-ce qu’une agression sexuelle ? Une tentative de viol ? Détrousser violemment les vêtements de sa victime ? Forcer une personne à accomplir des gestes sexuels sous la contrainte ? Alors, dans ce cas, ce n’est pas cher payé.
En l’occurrence Nicolas Bedos est accusé par une de ses plaignantes de s’être dirigé vers elle, tête baissée avant de tendre la main au niveau de ses parties génitales, lors d’une soirée en boîte de nuit et la seconde femme, serveuse, accusait l’artiste de l’avoir attrapée par la taille et de l’avoir embrassée dans le cou. Certes, ce n’est pas une façon très élégante de se tenir et une femme choquée par ce comportement est en droit de gifler l’importun. Mais, un baiser volé dans le cou justifie-t-il une plainte ? N’oublions pas que les faits se sont produits dans une boîte de nuit branchée de la capitale où hommes et femmes passent leur temps à danser de façon lascive, plus ou moins rapprochée, avec consentement réitéré selon les ondulations corporelles d’une chorégraphie improvisée.
Que les hommes qui n’ont jamais essayé d’embrasser une fille à vingt ans, jettent la première pierre à Nicolas Bedos ! Ce qui est gênant dans cette lourde condamnation, c’est la criminalisation d’attitudes qui n’ont causé aucune blessure physique ni dégât matériel. J’entends les saintes-nitouches et les pharisiens hurler qu’il y a sûrement des séquelles psychologiques. Et se prendre une veste, ça ne laisse pas de séquelles psychologiques ? Toute la vie n’est que séquelles psychologiques ! Mes congénères masculins devraient se rassurer : même Nicolas Bedos peut se prendre un râteau ! Ce qui est gênant dans cette condamnation, c’est le manque de proportionnalité pénale entre le geste déplacé et la véritable agression violente.
Ce manque de nuance relativise les délits. Il y a une hiérarchie dans la gravité des faits comme il y a une hiérarchie pénale. Nicolas Bedos paye-t-il sa notoriété ? Est-il la victime expiatoire des chiennes de garde et du mouvement « Balance ton porc » ? La sanction est lourde, étonnamment lourde. Ce genre de chose relève de la bienséance et ne devrait pas encombrer les tribunaux. Aucune sanction ne doit être prise pour l’exemple, car finalement, l’exemple n’est souvent que le cache-sexe du bouc émissaire, et en matière de justice, faire un exemple est une injustice. Cette justice-là ne sort pas grandie.

Le mot de la maison d’édition
La condamnation de Nicolas Bedos pose des questions essentielles autour de la justice. Ainsi qu’autour de la présomption d’innocence et des dérives médiatiques. Surtout dans une société qui est de plus en plus sensible aux comportements déplacés. Il est déterminant de savoir distinguer un geste maladroit d’une véritable agression. La justice doit opérer avec rigueur, mais aussi avec discernement. Ceci afin de préserver la distinction entre ce qui relève de l’inacceptable et ce qui constitue un acte criminel.
Pourtant, face à l’emballement médiatique, la présomption d’innocence se voit souvent fragilisée. C’est l’une des problématiques abordées dans La Question Interdite. Roman qui explore les dérives d’une société prompte à juger et à condamner sans nuance. Charles-Henri d’Elloy s’est quant à lui intéressé, dans son dernier recueil de chroniques Au bal des facétieux, aux travers et contradictions d’une société en quête d’exemplarité, parfois au détriment d’une justice véritablement équilibrée. Ces débats, au-delà du seul cas Bedos, soulèvent des enjeux profonds sur la proportionnalité des peines et la tendance au lynchage public, nous invitant à réfléchir sur l’équilibre fragile entre sanction et discernement.